Le 7 octobre, au lendemain des championnats du monde, je me suis réveillé avec un étrange sentiment : je n’étais plus un cycliste. Mon identité s’était évaporée dans le néant. Bien que certains aspects de cette transformation ressemblent d’abord à une crucifixion, le nouveau champ de possibilités qui s’ouvre devant moi, tel un rayon de lumière traversant un nuage, suffit à confirmer que je suis sur la bonne voie.
Pour vous donner un peu de contexte, j’ai participé à ma première course de vélo à l’âge de quatre ans. Pendant les vingt-trois années suivantes, presque toute ma vie a été dédiée à atteindre les meilleurs résultats possibles dans ce sport. C’est ce niveau de dévouement qu’il m’a fallu pour réaliser des progrès significatifs.
Je n’étais pas aussi talentueux physiquement que beaucoup d’autres cyclistes, surtout en grandissant, mais j’avais quelques cartes en main. L’une d’entre elles est ma résilience. Je ne saurais vous dire combien de fois j’ai réussi des performances inattendues, bien au-delà de ce dont j’étais capable habituellement. Lorsque les enjeux étaient élevés, il m’arrivait parfois de me pousser dans un nouveau domaine d’inconfort pour accomplir un exploit significatif. C’est ainsi que j’ai remporté ma médaille de bronze aux championnats de France sur piste et mes victoires internationales.
J’ai également perdu de nombreuses fois, mais j’étais toujours motivé à revenir plus fort. Peu importe combien de fois je tombais, il semblait que je croyais toujours que cela valait la peine de revenir. Je ne me serais pas qualifié de croyant à l’époque, mais aujourd’hui, en écrivant ces lignes, je comprends que c’est le comportement qu’on peut attendre d’un véritable croyant. Cette personne voit les défaites et les souffrances comme des opportunités de grandir et avance toujours, avec un cœur rempli de gratitude, même à travers les âges sombres de l’ombre.
Ma résilience est complétée par un besoin profond de chercher la vérité ; les deux vont logiquement de pair. On ne peut pas chercher la vérité sans être capable de supporter l’inconfort d’apprendre de ses erreurs. Cette quête profonde est la raison pour laquelle j’ai commencé à m’intéresser au bike fitting, et j’ai commencé à m’entraîner moi-même, insatisfait des approches standards. Je devais découvrir la vérité. Je savais qu’il existait une manière dont les choses devaient être faites. Il y avait un Logos Logos du bike fitting et de l’entraînement. En effet, je voulais progressivement assumer l’entière responsabilité de mes choix. Je comprendrais plus tard que cette responsabilité s’appelle l’âge adulte ; c’est la responsabilité de chercher constamment la vérité, de la vivre et de la transmettre aux autres. Cependant, cela ne doit pas être confondu avec une indépendance radicale, car tout humain raisonnable sait que la raison numéro un pour laquelle la vie vaut la peine d’être vécue, ce sont les relations.
Je suis donc en train de faire le changement le plus profond de ma vie : passer de cycliste à philosophe. J’avais refusé de l’accepter pleinement auparavant, mais la réalité est que cette année était déjà celle où ce passage devait s’opérer. En effet, si l’on tente de remplir deux verres avec un litre d’eau de manière équivalente, on ne peut qu’obtenir cinquante centilitres par verre : l’eau représente l’énergie. Cette analogie illustre la principale erreur que j’ai commise cette année. Revenons au concept de concentration sur une seule quête que j’ai exploré plus tôt. Il semble que les entreprises puissent être multiples si elles s’inscrivent dans une seule et même méta-entreprise. Cette quête principale est le reflet de l’archétype principal que l’on incarne. On devrait chercher à verser toute son eau dans un seul verre.
Bien que ce changement soit douloureux, il est aussi nécessaire. La vie est un changement constant. Alors que la quête physique a illuminé mon cœur pendant de nombreuses années, il est maintenant temps de laisser la quête intellectuelle prendre sa place. Enfant, on m’a beaucoup donné ; maintenant, en tant qu’adulte, il est temps pour moi de rendre ce que j’ai reçu. Bien sûr, je continuerai à m’entraîner, car je crois fermement en ce que doit être un homme : le corps d’un athlète et l’esprit d’un philosophe. J’essaie toujours de montrer l’exemple, ou devrais-je dire de vivre de la manière dont je crois qu’il faut vivre. J’essaie de ne jamais faire ce que, selon moi, les gens ne devraient pas faire si nous voulons améliorer le monde.
C’est notre responsabilité personnelle de suivre ce à quoi nous sommes appelés. Je sais à quel point cela peut être effrayant, mais c’est ce que Dieu veut pour vous. Préféreriez-vous prendre le risque de la stagnation, même si cela signifiait ne pas vraiment vivre ? « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort », a dit Nietzsche. C’est pourquoi cette composante de foi semble nécessaire. La raison peut nous mener loin, mais elle a ses limites. Nous pouvons tendre nos mains vers le ciel, mais quelque chose manquera toujours. Peut-être peut-Il tendre la sienne pour nous donner le courage d’agir.
Pour élargir cette idée de foi, les personnes les plus religieuses sont parfois les moins religieuses, et inversement. La religiosité se prouve par la capacité à agir avec vertu et confiance, même si, de l’extérieur, cela peut parfois sembler contre-intuitif à certains esprits. En effet, je veux dire qu’un croyant ne devrait pas avoir peur d’agir. Plus précisément, on peut avoir peur, mais avoir suffisamment de foi pour ne pas laisser cette peur nous empêcher de poursuivre notre entreprise. Il agit malgré la peur du changement, sachant que la récompense potentielle dépasse largement le risque.